Sisyphe perd la tête
Visitor Q
(2001, Japon)
Réalisé par Takashi Miike
Avec : Kenichi Endo, Shungika Uchida, Jun Mutô
Genre : Comédie dramatique
1h24
Int. -16 ans
Le Synopsis
Dans cette famille de déséquilibrés, le père couche avec sa fille prostituée, le fils humilié par des camarades de classe bat la mère, qui se donne à des hommes pour payer sa drogue. Il n’en faut pas plus pour décider le père d’en faire un documentaire.
La Critique
Asiatiquement inspiré du Théorème de Pier Paolo Pasolini, Visitor Q fait partie d’une commande de films ayant pour thème l’amour. Miike en offre une vision éruptive, cinglante, irrationnelle.
Le film déroute d’emblée le spectateur, par une scène d’inceste qui mêle candeur et sentiments de culpabilité. Le ton est donné. Irrévérencieuse et libérée de tout tabou, la réalisation esquisse le portrait de personnages déboussolés et indifférents au monde qui les entoure. Une famille éclatée dont l’hyperréalisme se fait le miroir de notre propre vécu.
Loin de toute pudeur, Miike filme l’obscénité quotidienne, tout en évitant la vulgarité. Les scènes de sexe volontairement ostentatoires tendent vers le masochisme sans pathétisme. A leur côté, une violence gratuite en perpétuel recommencement, véritable source d’inspiration pour un père devenu fasciné par les déboires de son fils.
S’invitant au beau milieu de ce désordre charnel, le « visitor » devient spectateur imperturbable, mettant en lumière des questionnements intimes : liberté de disposer de son corps, rapport à la violence, fondements de la famille, etc. Ajoutons un jeu constant sur les fluides, corporels ou non ; une source d’interrogations parmi d’autres.
Par sa crudité et l’atmosphère déjantée qu’il inspire, Visitor Q préfigure le délire surréaliste Gozu. Une chose est sûre, Takashi Miike n’a pas fini d’exploiter cette voie. Pour le plaisir assuré de ses spectateurs.